Je reviens après le vote du budget 2021 avec quelques ressentis sur le fonctionnement politique. J’essaierai de prendre le temps de développer ces ressentis dans de prochains articles.

D’ici là, voici un petit résumé subjectif de ces dernières séances.

# Processus d’étude du budget

Il est habituel, à Meyrin, que l’étude du budget se fasse en commission élargie. Cette démarche a pour but que tou·te·s les élu·e·s aient participé aux discussions et donc puissent se positionner correctement lors du vote du budget.

Apparemment, depuis plusieurs années, les Vert·e·s et le PS essaient de changer cela en renvoyant l’étude du budget en séances de commission simple. Lorsque lors de la séance du 13 octobre 2020, Michel Fabre, notre chef de groupe, m’a proposé de voter sur cette question j’ai été enchanté. Mon temps bénévole pour la gestion des affaires communales n’est pas extensible et j’ai pleine confiance en mes camarades pour défendre les valeurs sociales ainsi que pour nous rapporter les discussions de manière concise et objective. Mon avis n’est apparemment pas partagé, même au sein de mon groupe politique. Nous avons profité de certaines absences ainsi que d’une précipitation pour décider le renvoi en commission simple, par 16 oui, 13 non, 2 abstentions.

Le bilan de cette modification? De ce que j’ai entendu, les discussions ont été beaucoup plus rapides, ce qui semble logique, et le climat bien plus détendu. Et ce, malgré la situation pandémique et la mise en place d’un budget déficitaire de plusieurs millions. Le passage en commission simple n’est certainement pas le seul paramètre mais cela a eu un effet évident.

Un autre point important, moins d’élus en réunion veut également dire moins de jetons de présence. Sans prendre en compte la potentielle diminution du temps de travail, cette année la commission finances s’est réunie quatre fois entre fin octobre et début novembre, soit douze heures de travail. Il y avait treize élu·e·s et un président, donc vingt-et-un de moins que si nous avions été en commission élargie. À 75 CHF par heure, sans compter les cotisations patronales, on est à près de 19 000 CHF d’économies juste avec cette modification.

Bref, c’est allé plus rapidement et ça a moins coûté, que demander de plus?

# Les nouveaux camions du CVH

On est sur cette discussion depuis quelque temps déjà, le CVH ayant besoin de nouveaux camions de levée de déchets, j’en ai déjà parlé dans mon précédent billet Politiquons II.

La commission Environnement durable s’est réunie et a décidé de privilégier une propulsion électrique pour les nouveaux camions de levée de déchets. Les deux principaux arguments qui ont fait pencher la balance sont la diminution de la pollution1 et la suppression de la majorité du bruit, le moteur devant tourner à son régime maximum lors du maniement de la grue.

Le seul point de désaccord de la commission est sur le prix. La motorisation électrique est beaucoup plus chère que la motorisation thermique. Le châssis à quatre essieux utilisé actuellement coûte 225 000 CHF alors que la seule option fabriquée en Suisse disponible actuellement coûte 673 000 CHF.

Messieurs Olivier Chatelain et Claudio Angius, respectivement responsable du service de l’environnement et responsable de la section routes et voirie, ont préparé un comparatif financier détaillé. L’entretien du véhicule est évalué à un montant similaire pour le nouveau camion, la redevance poids lourds liée aux prestations (RPLP)2 est censée disparaître. Le carburant lui, coûtant presque 20 000 CHF par année pour le diesel, devrait passer à un peu plus de 5 000 CHF pour de l’électricité. L’économie annuelle est donc d’environ 25 000 CHF par véhicule.

Ramené à un coût d’utilisation sur l’année, en prenant en compte un amortissement du véhicule sur huit ans, le modèle thermique coûtera 116 921 CHF par année alors que le modèle électrique coûtera 148 543 CHF, soit 27 % plus cher. Pour informations, vu que les coûts de fonctionnements sont largement plus faible pour le modèle électrique, si le véhicule est utilisé pendant plus de dix ans il coûtera moins cher que son équivalent thermique.

Bref, on nous propose donc une délibération modifiée avec un montant de 2 100 000 CHF pour l’achat de deux camions. Petit point comique avec la position de l’UDC qui soutient l’achat de véhicules électriques, mais qui demande à ce qu’ils coûtent le prix des véhicules diesel, auraient-ils l’impression qu’on peut définir les prix nous-mêmes? Délibération acceptée, nous aurons donc bientôt des camions électriques.

# Motion pour la relance économique et le soutien à la population

Le groupe PDC / Verts-libéraux propose une motion de relance économique et de soutien à la population, sous la forme de bons d’achats, en demandant au CA  :

De mettre en place un système de bon d’achat à faire valoir dans les commerces meyrinois d’une valeur de CHF 40.- au prix d’achat de CHF 20.-.

Cette question est très complexe, premièrement car il est nécessaire de clairement définir à qui est censé s’adresser la mesure. Je trouve questionnable de soutenir tous les commerces de la commune. Comment justifier que la Commune subventionne des stations essences Socar ou des énormes enseignes nationales comme la Coop ou la Migros?

Et si, comme énoncé par Tobias Clerc, un des buts de la démarche est de proposer un soutien à la population, ne serait-il pas plus intéressant de renvoyer les personnes en situations de précarité vers les services sociaux déjà en place, voir d’augmenter les montants alloués aux plus précaires?

Cette motion semble être très symbolique et sans impact réel, malgré cela, nous avons décidé de la renvoyer au CA. Nous attendons donc la solution qui nous sera proposée et je me positionnerai plus activement à ce moment-là.

# Le conte du budget

Après toutes ces discussions, nous arrivons enfin au tant attendu vote du budget 2021. Cette partie commence par la lecture du rapport de Cyril Nobs, élu UDC et rapporteur de la commission finances. Ce dernier étant absent, c’est mon ami David Dournow3 qui nous en fera la parfaite lecture de manière très professionnelle et neutre. Il nous emmènera pour un voyage dans nos esprits pendant quelque cinquante-trois minutes.

Alors oui, ne nous mentons pas, ces cinquante-trois minutes de lecture ont uniquement permis à chaque élu·e et employé·e de se perdre sur son réseau social favori ou d’avancer sur ses mails professionnels. Ça me questionne réellement sur la volonté d’efficience de notre conseil municipal. Ne serait-il pas plus pertinent de recevoir ces rapports avant la séance et que chaque élu·e prenne le temps de le survoler une fois afin de pouvoir passer du temps à en discuter en séance, plutôt que de passer du temps à en écouter une lecture?

Et même sur la question financière, une heure de lecture pour tout le Conseil municipal, sans prendre en compte le salaire des trois CA et des employé·e·s de l’administration ainsi que les ressources du théâtre qui ne sont habituellement pas nécessaires, coûte plus de 1 500 CHF. Loin de moi l’idée de dire qu’il ne faut pas rémunérer correctement les élu·e·s, en revanche je préférerais faire cette lecture chez moi et être rémunéré pour mieux préparer ma séance.

Bref, au final, le Conseil municipal a décidé, par dix-huit oui (PS Verts MCG), cinq abstentions (PDC) et huit non (PLR UDC) d’accepter le budget 2021. Le soutien de la part du MCG était surprenant mais bienvenu. Nous ne ferons pas partie de la liste des communes sans budget pour l’année prochaine, et ce malgré un montant déficitaire de plus de douze millions de francs.

# Conclusion

J’ai de plus en plus la confirmation de la lenteur et la lourdeur de cet énorme outil politique suisse. Je suis pas convaincu que ça soit la meilleure solution, j’ai besoin de prendre du recul pour pouvoir clarifier mon impression, ça viendra dans un prochain article j’espère.

D’ici là, prenez soin de vous pendant cette période difficile et j’espère que vous n’êtes pas trop précarisé·e·s par la crise économique.


  1. Bien évidemment, si l’électricité consommée par le camion lors de la recharge provient d’une production carbonée (fuel, charbon), on ne fait que délocaliser la pollution, mais si l’électricité provient d’une source décarbonée comme le nucléaire ou l’hydraulique, alors la pollution générée par l’utilisation du véhicule est effectivement très faible. ↩︎

  2. La RPLP sert en quelque sorte de contre-poids à l’augmentation de la limite du poids des camions, qui est passée de 28 à 34 tonnes en 2001 et à 40 tonnes en 2005. Elle est appliquée pour les véhicules de plus de 3,5 tonnes, suisses et étrangers, transportant des passagers ou des marchandises sur l’ensemble du réseau routier public. La redevance est calculée à partir de trois bases : les kilomètres parcourus sur le territoire suisse ; le poids du véhicule ; les émissions de polluants du véhicule. Tiré de l’article Wikipedia ↩︎

  3. J’ai vraiment énormément de peine avec l’incohérence permanente de l’UDC. J’en ai déjà parlé dans mon dernier billet politique. Il nous a d’ailleurs ressorti son envie de soutenir les associations, le fait que nous l’avons rejeté car l’idée venait de son parti… ↩︎